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Statut professionel des microbiologistes du Québec

Les membres de l'AMQ constituent un groupe fort, autonome et indépendant. Ceci permet aux microbiologistes québécois de parler d'une seule voix lorsqu'il est temps de représenter, de promouvoir et de défendre leurs intérêts collectifs.

3. Démarches pour un encadrement par un ordre professionnel | Derniers développements (2022)

Contrairement à d'autres professions du domaine des sciences appliquées, telle que la chimie, l'exercice de la microbiologie n'est pas une profession encadrée par un ordre professionnel. Ceci expose le public à de graves risques de préjudices, puisqu'il est facile pour quiconque n'ayant pas les connaissances ou les compétences requises de s'arroger le titre de microbiologiste et d'exercer des activités normalement confiées à de vrais microbiologistes.

1. La situation des microbiologistes

Au Québec, l'exercice de la microbiologie n'est pas une profession à exercice exclusif ni à titre reversé, car elle n'est pas encadrée par le Code des professions ou par une loi professionnelle particulière. La microbiologie est donc une profession qui est non réglementée et les microbiologistes qui l'exercent ne sont pas membres d'un ordre professionnel. 

Heureusement, de nombreux microbiologistes qui pratiquent comme professionnels au Québec sont volontairement membres de l'AMQ. En devenant ainsi des microbiologistes agréés, ceux-ci s’engagent à respecter un code de déontologie et des règlements prônant le professionnalisme, la rigueur, l’éthique et la compétence. Toutefois, l'AMQ n’est pas un ordre professionnel ni un organisme doté de pouvoirs règlementaires définis par le législateur québécois. Bien que l’AMQ puisse s’inspirer des structures qui se retrouvent à l’intérieur des ordres professionnels et de leur fonctionnement distinctif, ses règlements n'ont pas force de loi et il n'est pas obligatoire d'être membre pour pratiquer comme microbiologiste au Québec. L’AMQ est donc limitée dans sa capacité à encadrer adéquatement la pratique de la microbiologie.

Ordre des chimistes du Québec

Depuis 2013, certains microbiologistes titulaires d'un diplôme universitaire de baccalauréat en microbiologie du Québec peuvent devenir membres de l'Ordre des chimistes du Québec, car l'Ordre a reconnu la formation des microbiologistes comme étant globalement équivalent à celles qui donnent droit au permis de chimiste.

Toutefois, cet encadrement de certains microbiologistes par l'Ordre des chimistes est limité. En vertu de l’autorité que lui confère la Loi, l'Ordre des chimistes encadre les activités afférentes à la chimie qui sont exécutées par les titulaires d’un permis de chimiste, dont certains sont des microbiologistes. L’Ordre n’encadre pas l’exercice de la microbiologie ni les autres activités exercées par les microbiologistes qui ne sont pas afférentes à la chimie ni l’utilisation du titre de « microbiologiste ». Dans le domaine de la microbiologie, l'Ordre peut seulement encadrer les activités afférentes à la chimie exercées par des microbiologistes titulaires d’un permis de chimiste.

Sous cette forme, cet encadrement exercé par l'Ordre des chimistes est incomplet et ne protège pas adéquatement le public face à tous les risques de préjudices graves en lien avec l'exercice de la microbiologie.

2. Risques de préjudices graves pour le public

Dans un souci de protection du public en regard du risque que représentent les microorganismes pour la santé et la sécurité de la population, ainsi que des activités exercées par les microbiologistes et la latitude dont ils disposent en raison de la nature de leur travail, l'AMQ est d'avis que la pratique de la microbiologie devrait être réglementée par un ordre professionnel. Ceci permettrait de veiller plus adéquatement au respect et au contrôle des saines pratiques des microbiologistes et leur offrirait les outils nécessaires pour exercer pleinement leur responsabilité professionnelle.

L'Office des professions du Québec a émis trois avis concernant l'encadrement de notre profession, dont l'un recommandait la création d'un ordre en 1990. Cela a conduit le ministre responsable de l’application des lois professionnelles de l'époque à signer un projet de lettres patentes, mais la tenue des élections générales à l’automne 1994 a fait dérailler le processus. L’analyse de la situation des microbiologistes s’est néanmoins poursuivie à l’Office dans les années qui ont suivi, particulièrement dans le cadre de l’analyse des demandes d’encadrement présentées conjointement par l'AMQ et l’Association des biologistes du Québec (ABQ) en 1999 et 2007.  Or, malgré les espoirs suscités au début des années 90, nous avons essuyé deux refus de l'Office.

Pourtant, les risques inhérents à la microbiologie vis-à-vis de la protection du public n’ont pas diminué. D’ailleurs, plusieurs évènements justifiant la création d’un ordre professionnel ont fait la manchette ces dernières années. Il n’y a qu’à penser à:

  • la tragédie de l’eau contaminée dans le réseau municipal de Walkerton (2000);
  • au faux scandale sur la qualité de l’eau des piscines publiques de la Ville de Montréal (2006);
  • la crise de la listériose dans l’industrie du fromage (2008);
  • aux efflorescences d’algues bleues dans des lacs du Québec (2008-2009);
  • aux problèmes de moisissures dans les écoles (2012);
  • l’éclosion mortelle de légionellose à Québec (1996 et 2012);
  • la viande contaminée chez Maple Leaf (2008) et chez XL Foods (2012);
  • la recrudescence de la maladie de Lyme (2013-2014).
  • les cas de statagèmes frauduleux dans l'industrie de la décontamination fongique résidentiel;
  • les cas d'infestiations résidentielles par la mérule pleureuse.

Sans parler d’autres cas douteux de pratique de la microbiologie dont les correctifs n’ont pu être apportés faute d’encadrement professionnel.

3. Démarches auprès de l'Office des professions du Québec

2013

Les travaux de modernisation des lois professionnelles du domaine des sciences appliquées ont donné lieu en novembre 2013 à l’étude en commission parlementaire du projet de Loi no 49 – Loi modifiant diverses lois professionnelles et d’autres dispositions législatives dans le domaine des sciences appliquées (PL-49) pour lequel l’AMQ a déposé un mémoire

Les travaux de la commission parlementaire ont mis en lumière le fait que les microbiologistes étaient susceptibles de réaliser certaines des activités que le PL-49 proposait de réserver à d’autres professionnels du domaine des sciences appliquées, dont les chimistes. Dans ce contexte, l’AMQ a initié plusieurs interventions afin de sensibiliser les élus aux enjeux de la reconnaissance professionnelle des microbiologistes. Dans la foulée, le ministre de la Justice et responsable de l’application des lois professionnelles a confié à l’Office le mandat de statuer sur l’intégration des microbiologistes au système professionnel. Une demande a également été faite à l’endroit des biologistes, mais celle-ci a été traitée séparément pour permettre à l’Office de considérer adéquatement la spécificité propre à chacune de ces deux professions.

2014-2015

Considérant la complexité de la pratique des microbiologistes et des biologistes, l'Office a mis sur pied un groupe de travail interne qui a reçu le mandat de récolter l'information nécessaire pour brosser un portrait de la situation des microbiologistes et des biologistes dans deux domaines ciblés prioritairement: les laboratoires médicaux et le domaine de l'environnement.

Ces domaines ont été retenus par l'Office puisqu'il semble qu'on y réalise des activités pouvant présenter un risque pour le public lorsqu'elles sont effectuées par des personnes ne disposant pas de la compétence propre aux microbiologistes et aux biologistes.

  • Dans le milieu des laboratoires médicaux, les membres de certains ordres professionnels (médecins, biochimistes cliniques, technologistes médicaux) collaborent quotidiennement avec des microbiologistes ou des biologistes non-membres du système professionnel. Cette cohabitation peut être source de frictions interprofessionnelles. En outre, certaines activités exercées en laboratoire paraissent soulever des enjeux pour la protection du public, notamment lorsqu'elles visent la préparation de traitements qui mettent directement en jeu la sécurité des personnes. Rappelons que le Groupe de travail ministériel sur les professions de la santé et des relations humaines proposait que l'Office examine l'opportunité que le système professionnel encadre certaines activités effectuées dans les laboratoires de biologie médicale par des non-membres d'un ordre professionnel.
  • Les travaux entourant la préparation du PL-49 ont également mis en lumière le fait que les microbiologistes et les biologistes sont amenés à collaborer avec des professionnels du domaine des sciences appliquées, notamment les géologues, les ingénieurs et les chimistes, dans le cadre de travaux dans le domaine de l'environnement. Là encore, il s'agit d'une situation qui peut être source de tensions interprofessionnelles. En outre, des allégations laissent croire que certaines des tâches réalisées par les microbiologistes ou les biologistes dans ce domaine pourraient mettre en jeu la protection du public.

L’AMQ a été invitée à des rencontres auprès de l’Office afin de participer au processus de documentation de la pratique de la microbiologie et de partager sa position sur l’opportunité d’encadrer les microbiologistes par le système professionnel. L’AMQ a fait part des particularités propres à la pratique de la microbiologie et a su mettre en évidence les ressemblances et les différences fondamentales qui existent entre la microbiologie et d’autres sciences appliquées.

L'AMQ a émis de sérieuses réserves face aux choix de l'Office de cibler uniquement les deux domaines mentionnés précédemment dans ses premières consultations, car cela esquive des pans complets de l'exercice de la microbiologie, dont le domaine agroalimentaire, où le risque de préjudice pour le public est pourtant évident. L'AMQ a également mentionné à l'Office que le domaine de la microbiologie environnementale était vaste et qu'il ne fallait pas se restreindre uniquement aux analyses de la qualité microbiologique de l'air réalisées par les laboratoires accrédités par le CEAEQ. Plusieurs cas de fraudes dans l'évaluation de contaminations fongiques résidentielles faite par de faux microbiologistes nécessitent une attention particulière de l'Office.

Parallèlement, l’AMQ a continué de collaborer avec d’autres intervenants dans ce dossier, dont l'Ordre des chimistes du Québec, avec qui nous partageons des liens interprofessionnels importants.

2016

Au terme de cet exercice, l’intégration des microbiologistes et des biologistes au système professionnel a été avancée par l’Office comme une solution aux diverses problématiques soulevées à l’égard de la protection du public.

À ce stade des travaux, l’Office n’a pas cherché à trancher la question de savoir si la microbiologie et la biologie devaient à terme être regroupées au sein d’une même profession ou constituées en professions distinctes. Il a plutôt travaillé de manière à développer des propositions de champs d’exercice qui cernent ce qui distingue la pratique professionnelle des microbiologistes de celle des biologistes.

Toutefois, l'Office a dû concentrer ses ressources au début de l'année 2016 sur la réforme du Code des professions en vue du dépôt  en mai du projet de Loi no 98 – Loi modifiant diverses lois concernant principalement l’admission aux professions et la gouvernance du système professionnel.

Malgré cela, l’Office a pu poursuivre la préparation de documents de consultation afin d’éclairer les différents aspects dont il devra tenir compte dans l’élaboration de ses recommandations. Cette documentation présente une synthèse des renseignements qui ont été recueillis et analysés au courant des années 2014 et 2015

2017

Le groupe de travail interne, conjointement avec l'AMQ et l'ABQ, a colligé les renseignements nécessaires à la préparation de documents de consultation devant servir à valider et à bonifier, auprès d'experts du milieu, le portrait de la situation professionnelle des microbiologistes et des biologistes documenté entre 2014 et 2016.

Les documents de consultation se déclinent en trois volets.

  • Dans un premier temps, les experts devront se prononcer sur la question à savoir si les microbiologistes et les biologistes partagent un même champ de pratique, ou si ces deux disciplines doivent être considérées comme des professions distinctes au sens du Code des professions.

  • Ensuite, les recommandations des experts devront porter sur le champ d’exercice décrivant le mieux la profession de microbiologiste et celle de biologiste. Ces champs d’exercice doivent décrire de la manière la plus précise et distinctive possible ce qui constitue l’essence de la pratique des microbiologistes et des biologistes.

  • Finalement, les recommandations des experts devront permettre d’identifier les activités professionnelles qui devraient être réservées exclusivement aux microbiologistes et/ou aux biologistes. Pour ce faire, il sera nécessaire d’identifier les activités qui posent un grave risque de préjudice pour le public lorsqu’elles sont réalisées par des personnes ne disposant pas de la compétence propre aux microbiologistes et aux biologistes.

2018

Les consultations particulières menées par l'Office ont eu lieu à la fin du printemps 2018. L'Office a pu récolter toute l'information nécessaire pour formuler des recommandations appropriées au gouvernement concernant un éventuel encadrement de la microbiologie et de la biologie.

2019

La nouvelle ministre de la Justice et responsable de l'application des lois professionnelles, Me Sonia LeBel, ainsi que les membres de son cabinet, font preuve de beaucoup d'ouverture afin de bien comprendre les enjeux professionnels actuels, notamment en matière de protection du public et d'encadrement des professions.

L'AMQ a profité de ce renouveau politique pour aller à la rencontre du cabinet de la ministre LeBel, afin de faire le point sur ses intentions à l'égard de l'encadrement des microbiologistes et voir comment l'AMQ peut continuer à jouer un rôle d'allié dans ce dossier.

La nécessité de mettre en place un encadrement de l'exercice de la microbiologie, par un ordre professionnel, pour assurer une meilleure protection du public a largement été évoquée avec la cabinet de la ministre. Nous sommes confiants de voir le dossier évoluer significativement dans les prochains mois.

 
 

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